ALBUM - Kenyon - Le choix des armes - Musicast - NOV 2015

« J’rime depuis l’époque où ma clique et mes XX loin d’la bride, j’m’applique et j’kick sans trop m’dire que ça vire au gris mais le pire est à venir et si j’ai tort, j’quitterai le navire en criant nique l’industrie d’leurs disques prend le risque de fuir mais qui est à même d’plier l’score ? ».

Dès le track d’introduction, Kenyon annonce la couleur en faisant valser son flow rythmé et technique sur la prod. Il rappe, il chante, « sur du pera du ragga ou autre », il fait bouger la tête et on aime ça : Le choix des armes s’annonce comme un bel EP.

Très technique, donc dès l’introduction, le flow du rappeur ne s’essouffle jamais, se surpassant en sonorité et en rythme, dansant entre la rapidité et la douceur, se faisant parfois discret quand il laisse place au timbre mélodieux et sucré de sa voix sur les refrains chantés qu’on retrouve sur tous les tracks de l’EP, laissant les couplets respirer et multipliant par dix la musicalité générale du projet.

On ne lasse pas de son timbre si particulier, qui colle à la perfection aux multiples influences musicales qu’offrent les prods. Entre des sonorités trap très modernes, des influences fortement marquées hip hop, et de nombreuses sonorités reggae, le tout entrecoupés de samples délicieux et harmonisé sous la voix de Kenyon.

Le tout forme un ensemble riche, à la dominante extrêmement douce et plânante, et pourtant merveilleusement rythmée. Les milles facettes de la voix de Kenyon, entre aigüe et grave, entre le rap et le chant, donnent un relief non négligeable au projet, qui s’enrichit en plus de la participation de MC Brid (sur le titre éponyme « Le Choix des Armes »), de celle de son collègue et ami – et rappeur de génie – A2H (sur « Karma »), dont le flow s’inscrit parfaitement dans la tendance du projet : doux et magnétique, se réveillant d’un coup entre deux kick, avant d’exploser en technique et sonorités.

L’un des morceaux se distingue particulièrement du lot ; des légères influences reggae qu’on trouve ici ou là dans l’EP, Kenyon passe au pur ragga dans « Reste là bas ». Clâmant haut et fort qu’il mélange les styles, il le fait avec une aisance et un talent presque indécent, à l’aise sur tous les beats, non sans rappeler S-Pri Noir dans le même esprit. La nouvelle génération de la culture urbaine brise les codes, mélange les genres, et amène une couche de fraîcheur sur un paysage musical urbain trop souvent vieux jeu, et Kenyon s’inscrit parfaitement dans cette démarche, proposant un EP d’une grande qualité, riche, et dont on recommande tous les tracks.

« L’essentiel » également se présente comme l’un des morceaux phares de cet EP, délicieusement rétro, délicieusement hip hop, délicieusement sweet, avec les accents de soul de Malika Tirolien au refrain et dans le dernier couplet, un track magnifique et admirablement travaillé. Enfin, c’est un feat entraînant avec le très bon Deen Burbigo, Besoin de Personne, qui conclut ce projet. Riche, rythmé, et sans limite de style et d’influences : c’est ainsi qu’on résume cet excellent EP.

Hugo Rivière