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Positif, engagé, sur un beat entraînant, ce premier track est à lui seul un plat de résistance coriace pour les amateurs de musique : la voix du français aux influences jamaïcaines qu’on savoure sur la prod électronique s’offre sur la fin du morceau l’appui de scratchs du plus bel effet entre quelques notes de cuivres, avant de se clôturer sur un léger solo de guitare, histoire de ne léser aucune influence musicale.

Premier track significatif : le ton de l’album est donné, le reggaeman ne s’interdira rien, pour notre plus grand bonheur. Bien que l’hiver arrive, cela faisait maintenant plusieurs mois qu’une musique ne m’avait pas parue si ensoleillée.
A 25 ans, Naâman nous livre son deuxième album, plus abouti encore que le premier, Deep Rockers. 



Originaire de Normandie, Naâman a enregistré la majorité des titres de ce nouvel album à Paris, dans le but de prendre du recul; et ce n’est pas plus mal, parce qu’en plus de revenir avec des tracks d’excellente qualité, le bad youth est également revenu avec de fortes influences musicales, qui se ressentent plus ou moins sur certains titres. Naâman sait faire du reggae, et c’est toujours ce qu’il fait (et qu’il fait bien) : des titres comme International Love ou Live Up raviront particulièrement les amateurs.

Mais la force de Rays of Resistance réside dans sa richesse musicale : du reggae, on s’approche sur certains tracks de la funk, sur d’autres de la soul, sur d’autres encore du hip hop, avec quelques touches de dub ici ou là.
Le premier single, Outta Road, en offrait déjà un avant-goût des plus appréciables, avec ses airs funky. L’ensemble est cependant parfaitement cohérent, et donne à l’album encore plus de couleurs que le simple timbre de voix de Naâman ne le fait déjà, tant sur les mélodies lancinantes autant que sur les prods enflammées. On ne s’en lasse pas.
 

 Capable donc de contenter les amateurs de reggae « classique », Rays of Resistance n’en lèse pour autant personne d’autre, et réserve quelques surprises de fort bon goût. A l’écoute de son premier projet, Smoke Tricks m’avait bluffé et offert du chill comme jamais, et c’est en grande partie pour redécouvrir un titre du même effet que je me suis précipité sur Rays of Resistance. Je n’en ai pas trouvé un, mais trois. 
Tout d’abord, Karma, dont les premières secondes suffisent pour prouver la qualité du titre et son incroyable taux de chill, presque nostalgique. Un morceau d’une intense douceur, bien que la voix magique de Naâman se fasse nécessairement entraînante sur les refrains. Une marque de fabrique propre au chanteur, d’ailleurs, est bien de savoir alterner de façon instantané et sans aucune difficulté entre le calme et l’excitation, entre les aigües et les graves, et ce tout au long de l’album, et de façon plus prononcée encore que sur son premier projet.


Poursuivant mon exploration passionnée de la tracklist, je suis donc tombé sur un second morceau s’éloignant un peu de ce que Naâman offre d’habitude, avec Those Rays. Le premier featuring de l’album, avec le rappeur Némir. Là, les mots commencent à me manquer pour décrire ce track. Outre le délicieux sample de guitare, et la prod planante au possible, la combinaison de la voix lancinante de Naâman avec celle, si particulière et unique, de Némir, offre un rendu d’une profondeur et d’un calme rare, et ô combien appréciable. Tirant vers le dub ou le cloud-rap, ce morceau d’un genre nouveau pour l’artiste est une réussite totale, et ne brise en rien la dynamique de l’album, lui offrant au contraire une respiration bienvenue.

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Enfin, le nuage sur lequel Rays of Resistance sait parfois nous emmener atteint son apogée sur le morceau My Days, en featuring avec la princesse du raggamuffin de Glasgow, je parle bien sûr de miss Soom T. Qui aurai parié sur une telle réussite de Naâman sur du reggae-dub ? Quels que soient les styles musicaux auxquels il s’essaye, il le fera bien. D’habitude, j’écoutais Naâman l’été, pour transcender les vibes estivales, la motivation et la bonne humeur qu’il offre. C’est toujours le cas, mais maintenant je sais que je peux aussi l’écouter quand je veux fermer les yeux et toucher le ciel. Et je ne m’en prive pas.
Mention spéciale également pour Garden of Destiny, un track sur lequel on retrouve ses acolytes de Know Yourself, Triple et Massy, pour un rendu tout aussi hip hop que ne l’était l’EP Know Yourself. La formule fonctionne toujours aussi bien, et l’alchimie entre les trois artistes fait effet. Je suis probablement déjà suffisamment élogieux sur l’album pour en rajouter, mais à l’écoute de Garden Of Destiny, la pochette d’un Distant Relatives me vient en tête… pas de comparaison hâtives bien sûr, remettons les choses dans leur contexte, mais il faut reconnaître que le bad youth a réellement progressé, que le trio avec Massy et Triple est une merveille, et que Rays of Resistance offre un contenu musical aussi riche qu’impressionnant. 
Enfin l’album s’achève sur une touche d’espoir, avec le très beau Hopeful World, et de légèreté, avec un Let Me Grow sincère, touchant, et qui conclut l’album de la plus belle de façon : « Cause we are the future, my brother, my sister… »

Hugo Rivière.