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Jah Cure – The Cure

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Jah Cure renferme certainement la voix la plus extraordinaire que l’on ait entendue dans le reggae depuis Beres Hammond. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard que ce dernier soit à l’origine de la carrière de Jah Cure, qui plus est redevable de son nom à un autre mentor en la personne de Capleton. Il entre dans la cour des grands dès 1997, à 19 ans, quand il interprète King in this Jungle avec Sizzla. Grâce à sa dualité entre la spiritualité rastafari et le registre des chansons d’amour, Jah Cure fait l’unanimité auprès des puristes et fins connaisseurs comme du public plus large du reggae-dancehall. Sunny Days, Spread Jah Love, Jah bless me, et Love is the solution, tous sortis en 1999, deviendront des classiques incontestés. 
Le premier album de Jah Cure est très attendu, cependant la carrière de jeune prodige se voit brutalement suspendue par une lourde condamnation en avril 1999.

 

 

 

 

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Enregistrant en prison, son troisième album « Freedom Blues » sorti en 2005 deux ans après « Ghetto » est certes celui de la confirmation, mais la révélation auprès du grand public se fait attendre en 2006 avec le titre True reflection. Le public de toute la Caraïbe découvre un jeune rasta humble, mélancolique à la voix poignante, transcendante. Jah Cure se voit dès lors adulé par un public féminin et respecté par un public masculin.
L’opus « True reflections… A new beginning » sort immédiatement après sa libération en 2007 et le succès est aussi imminent pour l’artiste qui livrait-là le meilleur disque de toute sa carrière. Jah Cure voit sa carrière prendre une envergure internationale avec le succès des tubes Longing for (Drop leaf riddim), To your arms of love (Guardian angel riddim) ou encore What would it take (Istanbul riddim). A la suite du réussi et éclectique « Universal cure » deux ans plus tard, Jah Cure tombe néanmoins dans une forme de routine artistique. Trois ans après le mitigé « World cry », le voici en lévitation avec son septième album le lévitique « The Cure », présenté en juillet dernier. 

 

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« The Cure » est l’album du retour aux racines pour Jah Cure. Les choix risqués du caractère monotone mélancolique et des influences hip hop qui caractérisaient « Universal cure » et « World cry » ne sont pas renouvelés. C’est une forme très moderne de nyabinghi alliée aux rythmes lents du roots qui introduit le disque avec les subtils No friend of mine, Corruption et Life we live. Les premières pistes de « The Cure » suffisent à donner le ton d’un album unique au sein de la discographie de l’artiste âgé de 37 ans. La direction artistique de Jah Cure est précise, assumée, défendue tout au long des 13 pistes. Un reggae large et sous différentes formes, à la fois épuré et modernisé.
Les sonorités roots composent l’autre ambiance présente tout au long de l’album avec les morceaux I surrender et Set me free, mais aussi l’excellent Other half of me et le rassembleur titre de clôture Stay with me. La plus grande surprise de cet album intervient certainement sur I surrender, au point d’en être certainement la plus réussie, la plus aboutie. On y découvre un Jah Cure loin de la facilité tant reprochée qui chante son vécu avec l’émotion qui fait sa force : 
« Regarde de quoi j’ai été accusé, j’ai dû payer deux fois
[…] C’est à ce moment-là que je me rappelle que seul Jah peut me juger
[…] Eux, ils veulent me voir en prison
Me voir loin de la grâce, ou me voir l’obtenir en étant derrière les barreaux »

 

 

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Tout au long de « The Cure », le retour aux sources de Jah Cure cohabite avec sa science des tubes. Et malgré les multiples influences, les tubes les plus efficaces sont bel et bien à consonance reggae. Le résultat réussi de ce métissage s’illustre sur deux belles chansons, les deux grands singles de « The Cure ». Made in California, single à destination du public des Etats-Unis, débute sur un rythme électro avant de transiter avec brio sur des notes reggae et un refrain accrocheur qui fait l’excellence de Jah Cure. Pour autant le grand tube de cet album est sans doute Set me free, mélodie roots entraînante sur laquelle le mari et père dévoué chante d’une voix mélancolique et émouvante son amour indéfectible aux deux femmes qui ont libéré son âme :  
« J’espère que ce sentiment sera le dernier,
La vie prend tout son sens quand nous sommes ensemble
Je ne sais de quelle manière tu as vu l’amour que je renfermais
Et quand tu as trouvé la clef, tu m’as libéré »

 

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L’écoute de That girl suffit à attribuer à Jah Cure le titre de digne héritier de Beres Hammond, bien qu’il n’ait pas accordé au reggae de prestige la place méritée. La palme en la matière revient évidemment au titre le plus évocateur, Rasta, qui se positionne dans la continuité des plus grands classiques reggae de l’artiste entre 1999 et 2005. 
Ce septième album, en plus d’être à la hauteur de son talent, est enfin à la hauteur de l’ambition de Jah Cure de poursuivre sa (re)conquête du public américain et européen. « The Cure » est bel et bien un album du reggae large et universel. Les sonorités variées y sont mêlées avec parcimonie à d’autres influences qui n’en altèrent pas le caractère épuré. Accessible au large public grâce à des choix risqués et réussis, « The Cure » n’en est pas moins crédible auprès du public de la première heure, notamment de la Caraïbe qui pourra aussi l’entendre exceller. Jah Cure d’ores-et-déjà réussi à séduire les Etats-Unis en restant trois semaines à la tête du classement reggae du Billboard. Set me free, qui est le single de l’album prévu à l’automne pour l’Europe pourra également lui assurer un accueil intéressant à condition d’une entrée en radio et en télé qui devra être appuyée par VP Records. Parce que le grand Jah Cure est bel et bien de retour et vient de livrer à coup sûr son meilleur album depuis « True reflections ». 

 

Chronique par Jason Moreau pour Partytime.fr

Credits photos: 1 - TheSocalyst.com / 2 - YardFlex.com / 3 - VPrecords.com / 4 - Pearo Photography / 5 - Wikipedia

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