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Mr Tube est un faux-ami

La coutume, qui veut qu’un samedi soir se déroule en plusieurs temps forts, est ici respectée : « Saturday Night » est divisé par trois interludes : les histoires dans le Before, les hits à l’heure de la Party et l’art de parler aux femmes en After. X-Man est surtout connu pour être une machine à tubes qui fait danser depuis la Caraïbe jusqu’en Europe. Ce second album se présente dans la continuité du premier, avec quelques perles en guise de surprises témoignant de la maturité artistique du martiniquais qui fêtera ses 30 ans dans quelques mois. Les faits divers faisant régulièrement les gros titres aux Antilles, X-Man leur adresse le morceau Médias dans lequel il leur reproche le surplus d’intérêt pour la violence et la voyoucratie à des fins d’audience :

X-Man.jpg« Ca ne les intéresse pas de savoir que je fais voyager le créole dans le monde entier,

Si j’avais été pris à l’aéroport avec de la cocaïne, ils auraient été les premiers à en parler…  

Il y a des jeunes diplômés désormais entrepreneurs qui sont des exemples à suivre,

Mais pour les médias c’est pas passionnant, ils veulent des scoops, du sang, de la violence ! »



Le concept le plus intéressant du disque est incontestablement sur la piste Fake friend. L’histoire d’un jeune bandit, condamné à cinq ans ferme pour vol à main armée, qui sort de prison et appelle son ami complice pour récupérer sa part du butin. Non seulement il ne reste plus rien, et voilà qu’en allant régler ses comptes il surprend sa femme chez son complice. S’en suivront 6 coups de feu sous l’impulsion du désir de vengeance, et l’on est encore plus surpris d’apprendre le dénouement de ce scénario faux-ami. Un coup de génie signé X-Man dont on attend impatiemment le court-métrage…

« Le Vybz Kartel de Martinique » dans toute sa splendeur

X-Man2.jpgLa Party est comme prévu le moment le plus long de «Saturday Night ». L’X-traterrestre y est en forme olympique et produit ce qu’il sait faire de mieux en ce moment. Il démarre fort avec la bombe My name is : refrain efficace, rimes à la chaines et flow toujours en harmonie avec un son à l’empreinte martiniquaise taillé sur mesure pour X-Man. Si l’on regrette un hit mal façonné comme Bouge, on salue le vintage de Raggamuffin qui devrait conquérir la France et l’Europe : X-Man fait l’effort de chanter des couplets précis et charismatiques en français, sur des sonorités rappelant le raggamuffin à la veille des années 2000, le tout contrasté par un refrain fruit du métissage entre ragga et électro dans l’air du temps. Parfait mélange des genres.

Les meilleures surprises se trouvent dans le court moment After. Xavier a repris ses esprits, est moins excité et sort sa plus belle plume pour parler de ses émotions, à mi-chemin entre séduction et amour. Seule collaboration sur « Saturday Night », Thug Love en est l’une des meilleures pistes et en sera sans doute Le grand single. On est agréablement surpris de la douceur apportée par la jamaïcaine J Capri qui accompagne un X-Man qui se libère de sa thug life pour embrasser le thug love.



« Saturday Night » est un disque éclectique. X-Man a su garder et faire évoluer sa dancehall made in Martinique sans jamais la dénaturer, éviter le piège de la facilité comme celui du racolage, proposant des thèmes inédits et des morceaux soignés bien singuliers. On est ravi de l’entendre s’exercer sur du reggae avec Telle que tu es pour raconter une histoire, et élargir son univers sur Raggamuffin. Un album qui illustre ce qui se fait de mieux dans la dancehall en ce moment. X-Man revendique son amour pour la dancehall brute, toujours en cohérence avec ses responsabilités. Seul un extraterrestre peut être aussi excellent.

Jason Moreau pour partytime.fr