Balik_by_Lisou.jpg« Qui sommes nous ?
Gens de la campagne ou de la ville, d'un peu partout.
Nous sommes le peuple qui s'indigne.
On est là, on a lu et les langues se délient »
C'est l' « Outro »(13), titre acoustique qui nous est offert « juste en passant, avant de nous laisser » qui résume (ou introduit) la ligne directionnelle de l'opus.

Balik constate, Balik dénonce avec de plus en plus d'aisance verbale, sans pour autant tomber dans la facilité et la démagogie.

Oui, les langues se délient et les « Hypocrites » (4), ne sont pas épargnés. Mais « ils finiront par nous voir grandir car sûrs de nos valeurs, forts et fiers de nos couleurs, nous resterons debout dans l'arène comme le dernier des gladiateurs » .

Les hypocrisies des règles qui régissent le monde, des rapports et des relations entre les pays occidentalisés et l'Afrique plus particulièrement, sont évoquées. Des thèmes qui sont chers au groupe, puisque le chanteur réside désormais une partie de l'année à Bamako.

Il a pu constater comme son pays d'accueil « Mali Mali » (2) avait pu être mis « à feu et à sang, comme si la population n'avait que faire de lui ».

Naty_Jean_and_Balik_for_Party_Time.jpgNatty Jean n'est pas en reste. Le singjay sénégalais , qui fait maintenant partie intégrante de l'équipe, a souvent rencontré de grandes difficultés à obtenir les visas nécessaires pour participer aux tournées précédentes. Les passages d'un pays, d'un continent à l'autre, les échanges, ne sont pas toujours aisés. C'est néanmoins avec entrain, sur une rythmique et une mélodie plutôt légères et dansantes, qu'il offre le dialogue à Balik quant aux complexités pour l'intégration, l'accueil, d'une part et d'autre des frontières.

« J'ai lutté longtemps, indéfendables empoisonneurs d'enfants, l'or noir détruit chez nous tout autant que là bas, chaque jour, il rapporte de l'argent », dit ce dernier lorsqu'il constate avec amertume les dégâts provoqués par « l'or noir » (9).

Que penserait Gandhi, cet homme de paix, s'il regardait l'évolution de notre planète ?

Le « Mahatma » (7) pourrait nous dire : « Mais malgré mon travail, tous les rêves laissés sur mon sillage, à vous voir les larmes coulent de mon nuage, alors il pleut sur nos visages ». C'est ce qui est supposé dans cette correspondance posthume imaginée.

Malgré ces constats amers, on a néanmoins la possibilité d'envisager, selon les rêves, les désirs, les facultés et les opportunités de chacun, un idéal de vie. Tiens, ça ne vous rappelle rien ?

Parce que l'album nous offre un voyage, au fur et mesure des titres, entre le monde tel qu'il est, le quotidien tel que nous le vivons, et le monde tel qu'il pourrait être, un parcours personnel qu'on pourrait changer ou des rêves qui nous effleurent.

Des rêves de « vivre plusieurs vies à l'intérieur d'une seule, comme les « poupées russes » (1) maintes fois ressuscitées ».

Des oscillations entre « fantasmes et vérités, entre le monde tel qu'on le rêve et celui tel qu'il est ». « Larmes d'or » (11).

« Le rêve » (3), dont le superbe clip a été mis récemment en ligne, est à mes yeux, le titre le plus recherché en terme d'écriture. Les inspirations RAP de Balik y transparaissent. Entendez rap au sens original du terme : Rythm And Poetry.

Le mot est juste, le verbe est acéré, les formules de style, les paronymes, les allitérations, la rime, valsent avec richesse et habileté. La profondeur et la douceur en même temps du refrain interprété en espagnol par une jeune fille répondant au prénom de Julie apportent une dimension supplémentaire à ce chouette titre.

 

 

L'opus est agrémenté de featurings de qualité, d'apport d'instruments traditionnels africains par Manjul mais aussi de la participation de Bozo, le talentueux saxophoniste de Sinsémillia. Il viendra compéter les harmonies de la section cuivre de Tom Tom à la trompette et de Das au saxophone tenor. Il nous offre d'ailleurs un petit solo plutôt sympathique dans « les signes » (6).

On découvre avec plaisir les voix mystiques des frères Grant, les talentueux Twinkle Brothers sur le titre éponyme « Entre les lignes » (5). Balik y explique cette nécessité de catharsis par l'écriture. « Ces pages blanches qui m'aident quand je flanche, ont besoin de noircir comme la bougie de la cire ».

On reconnaît aussi, dès le premier accord, la participation de Marcus Urani aux claviers qui confère à « we drop » (6), une ambiance musicale si particulière à Groundation, dont Danakil s'est offert, après plusieurs plateaux partagés ensemble, la collaboration. Les timbres de voix de Balik et d'Harisson Stafford s'y complètent judicieusement.

2014 est l'année de la sortie de cet album mais aussi l'occasion pour le public de découvrir (ou redécouvrir) « fool on the hill » (12), un classique des Beatles repris par la team dans une version roots.

Car effectivement, roots est le mot qui pourrait être utilisé pour définir l'orientation musicale de l'album. Un retour aux sources à la manière de Micro Climat et Dialogues de sourds, mais avec la maturité grandissante du groupe en tant qu'entité mais aussi celle de chacun des membres. Une maturité musicale acquise au cours d'une décennie passée à sillonner les routes, en France comme à l'étranger.

Parce que Danakil est incontestablement un groupe de live. Leur bonne humeur, leur joie, leur bonheur de se retrouver tous sur scène sont tellement communicatifs qu'on n'a qu'une seule hâte après avoir fait tourner « Entre les lignes », c'est de trouver une date au sein de leur tournée qui débute le 11 mars, pour le découvrir en vivant et en direct.

Notons que Danakil seront nos invités pour l'émission dans les studios de Partytime ce dimanche 23 février en interview et en feestyle.

                                                                                                       Chronique by Lisou Becker for Partytime.fr

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